Alter ego : Bedrock

Je les regarde tous les deux depuis longtemps.

Quelle est la base ?

Où est le fondement ?

Puis — un murmure :

Tu sais, Lori, je me sens bien.

Allongé contre ton flanc,

les doigts enfouis dans ta fourrure soyeuse,

je sens le rythme de ton souffle.

Tu n’attends de moi ni exploits, ni paroles, ni compliments.

Tu veux seulement ma paix,

ma confiance tranquille.

Peut-être qu’elles ont leur propre parfum.

Et tu attends encore le grand champ,

l’instant où ton corps entier s’élance,

libre,

déchirant l’espace droit vers l’horizon.

Comme un ressort, tu te tends,

puis tu jaillis,

éclair indomptable.

Puis tu vides ta gamelle avec un craquement joyeux,

bois de l’eau,

te couches à mes pieds,

fermes les yeux

et t’endors,

reprenant des forces.

Et tout cela, je te le donne,

ne prenant en retour que ton silence de chien

et ton regard,

que les hommes appellent

le plus fidèle du monde.

Qu’il nous regarde.

Oh… il a entendu ? Étonné ?

Peu importe.

Notre conversation — quand je parle et que tu écoutes —

n’est que son illusion.

Oui. Mes illusions…

Et qui sait quel « moi » vient en premier ?

Celui de la base et du calme,

ou celui de la dureté rebelle ?

Dmitry Sitko